Uniterre, AfA247

Uniterre, AfA247

Organisationsgeschichte, histoire de l'organisation

L'Union des producteurs suisses (UPS), tel était le nom d'Uniterre jusqu'en 2001, a été fondée en 1951. A Lausanne, des groupements de paysans de Suisse romande ont uni leurs forces, groupements qui s'étaient formés après la Seconde Guerre mondiale pour protester contre la politique agricole étatique soutenue par les associations agricoles établies. Dans le canton de Vaud, par exemple, les producteurs de lait se sont regroupés au sein de l'Union Romande des Agriculteurs (URA) pour faire grève contre les baisses de prix imposées par le Conseil fédéral. Et en Valais, les producteurs de fruits et de vin ont fondé l'Union des Producteurs Valaisans (UPV) en 1949. Celle-ci a notamment fait campagne pour une meilleure protection des abricots aux frontières pendant la courte saison de la récolte. Tous les groupements avaient en commun de reprocher aux associations agricoles établies d'être trop préoccupées par la mise en oeuvre de la politique agricole de l'Etat pour être en mesure de défendre efficacement les causes de leur base.

Après la fusion des groupements régionaux dans l'UPS, des sections ont été créées dans tous les cantons de Suisse romande et dans le Jura (alors encore bernois). Pendant près de deux décennies, l'UPS a été active exclusivement en Suisse romande, malgré son nom. Si on se rendait à Berne, c’était pour protester contre les mesures de politique agricole de la Confédération. Des manifestations spectaculaires de protestation, menant parfois à des émeutes et à des occupations de bâtiments, avaient déjà été pratiquées par les organisations régionales prédécesseures de l'UPS. Très vite, les organes de protection de l'Etat ont commencé à surveiller leurs activités et à créer des fiches sur nombre de leurs représentants. En 1967/68, l'UPS a commencé à travailler avec des représentants des comités d'action paysans de Suisse alémanique (Bäuerliche Aktionskomitees). De temps à autre, les deux groupements ont même uni leurs forces dans un "Comité suisse pour la protection des intérêts des paysans" . Les comités d'action paysans sont apparus à partir de 1963 dans les cantons de Berne et de Lucerne ainsi qu'en Suisse orientale pour des raisons similaires à celles de l'UPS au début des années 1950 en Suisse romande. Cependant, il y a toujours eu des différences. D'une part, les Suisses alémaniques avaient parfois eu du mal à faire face aux critiques sans concession par lesquelles les militants de l'UPS attaquaient les autorités et les représentants des associations. D'autre part, il y avait aussi des différences de contenu. En Suisse romande, l'UPS a toujours recherché activement la collaboration avec les organisations de consommateurs, les syndicalistes et les groupes d'opposition de gauche dans les villes. Dans les années 1970, 90 pour cent des membres de l'UPS déclaraient soutenir les causes des travailleurs organisés en syndicats. Cet aspect était presque totalement absent des comités d'action en Suisse alémanique. Ceux-ci n'entretenaient guère de relations avec les groupes d'opposition en dehors de la population paysanne. La collaboration entre l'UPS et les comités d'action a également toujours dépendu de la capacité des représentants dirigeants à se faire comprendre dans l'autre langue.

L'interaction la plus intense entre l'UPS et les comités d'action a eu lieu dans les années 1970. En 1973/74, ils organisaient des manifestations communes, dont l'une devant le Palais fédéral à Berne. Et en 1978, l'UPS et les comités d'action ont lancé le référendum contre l'arrêté sur l'économie laitière, qui prévoyait le contingentement de la production de lait au niveau de chaque exploitation individuelle. Ces mesures ont été perçues comme particulièrement injustes, car les petites et moyennes exploitations ne pouvaient survivre qu'en augmentant leur production, en raison de la politique des prix des autorités fédérales.

Relations avec les autorités et l'Union Suisse des Paysans (USP)

La formulation de critiques à l'encontre des autorités faisait en quelque sorte partie de l'ADN de l'UPS. L'UPS n'a jamais adhéré à l'Union suisse des paysans en tant que membre, car l'organisation faîtière était perçue avant tout comme le bras étendu de l'Office fédéral de l'agriculture. Mais aussi parce que l'UPS avait une compréhension de l'exploitation agricole fondamentalement différente de celle de l'USP. Celle-ci considérait l'exploitation agricole comme une entreprise et les agriculteurs comme des entrepreneurs qui exploitaient leur ferme à leurs propres risques, avec l'aide de leur famille. Dans cette optique, la réussite ou l'échec d'une exploitation dépendait essentiellement du chef d'exploitation et de sa famille. Face aux interventions étatiques dans la production alimentaire au niveau de l'exploitation individuelle, interventions qui ont pris des proportions considérables depuis la Première Guerre mondiale, les membres de l'UPS se sont considérés comme des "travailleurs de la terre" qui ne pouvaient survivre qu'à condition que l'Etat mène une politique agricole permettant aux exploitations de dégager un revenu comparable à celui du reste de la société. „L’UPS est un syndicat de travailleurs de la terre qui lutte pour le maintien d’une population paysanne nombreuse et décemment rétribuée“ est-il déclaré dans l’organe de communication l'Union du 2 juin 1982. „Elle combat, en priorité, pour le maintien des petites et moyennes exploitations familiales agricoles. Elle combat les grandes exploitations tournées vers l’industrialisation outrancière de l’agriculture. Elle exige l’application stricte de la Constitution et des lois démocratiques de notre pays, qui ‘décrètent’ que l’ensemble de la population doit vivre dans la paix et la satisfaction du travail. Elle exige un revenu équitable pour les familles paysannes, conformément à la loi sur l’agriculture de 1951“. Ces objectifs devaient être atteints par la fixation de prix couvrant les coûts de production, et non par des subventions.

Les relations entre l'Union des paysans et l'UPS se sont fortement détériorées en 1961 à l'occasion de la grande manifestation organisée par l'USP sur la Place fédérale à Berne "contre la sous-rémunération du travail paysan" , qui fut également soutenue par l'UPS. Après que des heurts entre manifestants et policiers se soient produits en marge de la manifestation, qui ont été vivement condamnés par la presse, l'USP a accusé l'UPS d'avoir traîné toute la paysannerie dans la boue par "son comportement d'extrême gauche" .

Représentants

L'UPS a également été façonnée par ses dirigeants. De 1951 à 1958, le Valaisan Broccard, Léon (1894-1976)--DB505 officia en qualité de président. Par la suite, c'est le vigneron genevois Berguer, Louis (1900-1986)--DB288 qui a assumé cette fonction. Lui a suivi en 1974 le Vaudois Tombez, Pierre (1929-2018)--DB3587, auquel succède en 1981 le Fribourgeois Chatagny, Martin--DB4357. Une figure importante a également été Chillier, Louis (-1982)--DB704, qui fut secrétaire de 1951 à 1967. Le jurassien Chapatte, Raymond (-1982)--DB676 lui a succédé et a entretenu de bonnes relations avec les représentants des comités d'action paysans comme Baumgartner, Ernst--DB6148, jusqu'à sa mort en 1982. Dans les années 1970, Därendinger, Ernst (1921-2006)--DB778, un Suisse allemand qui exploitait une ferme à Echichens (et écrivait des livres en parallèle), a également joué un rôle important. Därendinger a aussi écrit de nombreux articles pour l'Union, l'organe de publication de l'UPS depuis 1951. Celui-ci a été publié en version bilingue pendant un certain temps dans les années 1970. Därendinger, Ernst (1921-2006)--DB778 en a également assuré la rédaction en langue allemande.

Lorsque Tombez, Pierre (1929-2018)--DB3587 renonce à la présidence en 1981, Chatagny, Martin--DB4357, un militant de la nouvelle génération également engagé dans les questions de politique du développement, prend la tête de l'association. Chatagny s'est aussi fait connaître comme le représentant de ces agriculteurs qui, pour protester contre l'introduction des contingents laitiers, ont commencé à fromager leur lait "au noir" , c'est-à-dire illégalement, et à le vendre directement aux consommateurs.

Ces activités ont non seulement provoqué de dures réactions de la part des autorités, mais elles n'ont pas été non plus du goût de tous les membres de l'UPS. Hormis la perte d'adhérents causée par les changements structurels, les conflits internes ont conduit de surcroît à une crise financière. En été 1984, la question était: „Etre ou ne pas être“. Le Comité directeur a dû adopter en juillet de rigoureuses mesures d'austérité. Cuche, Fernand (1946-)--DB754, qui avait été élu secrétaire l'année précédente, a beaucoup contribué à la réorganisation et à la consolidation. Ce rhétoricien et communicateur avisé a occupé cette fonction pendant plus de deux décennies et fut perçu par le public comme le représentant le plus important de l'UPS.

Recul en Suisse romande et nouveaux contacts en Suisse alémanique

Dans les années 1980, non seulement l'UPS en Suisse romande est en crise, mais aussi les comités d'action paysans en Suisse alémanique. Au début de la décennie, avec la création de la Kleinbauernvereinigung (VKMB), AfA230 et de Bio Suisse, AfA309, des agriculteurs critiques ont commencé à s'engager dans de nouvelles organisations. Comme la VKMB s'est d'abord engagée totalement dans la revendication de prix différenciés, puis dans le soutien inconditionnel à l'introduction des paiements directs imposée par la politique agricole officielle, il y avait aussi des différences de contenu substantielles entre la VKMB et l'UPS, qui empêchaient une coopération plus étroite. L'UPS s'appuie comme auparavant sur le postulat de prix équitables, qu'elle a tenté de réaliser en créant des régulations de marché qui ont renforcé les producteurs. Cependant, la nouvelle politique agricole, qui a obtenu le soutien de la majorité au début des années 1990, était basée sur une toute autre stratégie: la séparation de la production et de l'écologie. Cette stratégie voulait renforcer la concurrence internationale au moyen d'une politique commerciale libérale et prévenir, avec une politique environnementale interventionniste, la dégradation écologique également déclenchée par cette concurrence. L'une des mesures les plus importantes de la nouvelle politique agricole propagée sous le slogan "plus de marché" et "plus d'écologie" résidait dans les paiements directs pour rémunérer les prestations rendues au plan écologique.

Contrairement aux agriculteurs biologiques, à la VKMB et à l'USP, l'UPS n'a pas pu s'accommoder de cette politique. Elle s'est de nouveau heurtée aux autorités dans les années 1990 lorsque, avec l'Association des Groupements et Organisations Romandes de l'Agriculture (AGORA), AfA173, elle a intenté un procès en dommages et intérêts à la Confédération dans le cadre des mesures contre l'ESB. L'UPS a fait valoir que la Confédération avait causé un grand préjudice aux agriculteurs en s'abstenant initialement d'interdire l'utilisation de farines animales dans l'alimentation des animaux après l'apparition de l'ESB. Après que la commission de recours compétente, un tribunal administratif indépendant du Département des finances, ait admis l’action, le Tribunal fédéral l'a cependant rejetée.

Au début du siècle, l'UPS a également protesté de plus en plus contre la politique de prix des grands distributeurs. Lorsqu'elle a bloqué des centres de distribution en 2001, Coop (Coop - Verband Schweizerischer Konsumvereine, AfA232) et Migros (Migros-Genossenschafts-Bund (MGB), AfA220) ont intenté des actions en justice dans plusieurs cantons pour contrainte et violation de domicile contre plus d'une centaine de membres d'UPS. Le fait que les militants de l'UPS soient poursuivis en justice pour leurs actions fait presque partie du quotidien de l'organisation depuis la fin des années 1940. Mais cette fois, cependant, les frais d'avocat encourus furent si élevés que l'organisation a de nouveau connu des difficultés financières.

Après le changement de millénaire, l'UPS a non seulement pris le nom d’Uniterre, mais a commencé à s'organiser en Suisse alémanique aussi. Plusieurs sections ont été créées. Et dans l'organe de publication, désormais également rebaptisé Uniterre, les articles paraissent de plus en plus souvent en allemand, comme dans les années 70. Alt, Jakob (1944-2016)--DB4114 a été le premier Suisse allemand à être élu coprésident en 2012. Cependant, le centre géographique et politique de l'organisation ne s’en est pas trouvé déplacé pour autant. Uniterre est restée un groupement principalement actif en Suisse romande.

Auteur: Peter Moser

Archivbestand, fonds d'archives

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Website der Organisation, site internet de l'organisation

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Index der Funktionen, Index des fonctions

Présidents (1951-)

Secrétaires (1951-)

Uniterre, AfA247

Peter Moser, Uniterre, AfA247 .